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Thérapie familiale : quand son enfant dérape

Témoignage:

« Il est 18h et la famille M. reçoit un appel de la police leur expliquant que leur petit dernier, 14 ans, est au poste car il a été pris en flagrant délit de vol dans une grande surface. S’il est au poste, c’est que le montant des marchandises volées dépasse les 5000.- Frs. Les parents, affolés, se rendent sur place et finissent par récupérer leur enfant qui va faire l’objet de poursuites judiciaires et donc démarrer sa future vie d’adulte avec un casier. »

Des parents en état de sidération

Certaines familles, quel que soit leur niveau social, connaissent un jour ce moment d’incompréhension absolu que provoque leur enfant. On le constate, par exemple, lorsque des parents apprennent que leur enfant est un harceleur et que la découverte survient au moment où la famille de la victime porte plainte, ou qu’il est arrêté pour trafic de stupéfiants.

Dès l’instant où la justice est prise à partie dans les actes délictueux d’un enfant et que les parents sont confrontés à cet évènement hors normes dans leur vie, ils ont la sensation que le ciel leur tombe sur la tête.

Et si la « petite délinquance » était une étape normale du développement de nos ados ?

On a tous fait des écarts de conduite dans notre jeunesse, de manière plus ou moins forte et on continue à en faire en tant qu’adulte (excès de vitesse, téléphone au volant, ticket de tram pas payé…). Il y a cette petite sensation d’excitation à l’idée de ne pas se faire prendre, cette impression d’avoir été « malin » pour contourner l’interdit.

 La délinquance est un phénomène secondaire de l’adolescence. Elle fait partie du processus normal de sociabilisation des jeunes entre 12 et 18 ans. Ils testent, à travers ces comportements subversifs, la solidité des valeurs inculquées par leurs parents et les personnes en position d’autorité. Les limites et les sanctions appliquées par la société vont leur permettre de s’ajuster et d’intégrer leurs propres valeurs.

On peut dire qu’à ces âges-là, les adolescents ont assimilé les comportements et règles de vie en société et ont la maturité nécessaire pour comprendre les conséquences de leur violation des règles. Quand des actes de délinquance surviennent avant l’âge de 12 ans, alors le problème est bien plus sérieux qu’un simple besoin de s’affirmer. Il en va de même pour une simple crise d’adolescence qui impacte uniquement la sphère familiale (être insolant, braver les punitions…) à celle qui affecte toutes les sphères de la vie du jeune (école, activités extra-scolaire, cercle amical…).

L’impact de l’évènement sur la famille

Dès l’annonce de l’arrestation, c’est le choc. Les familles vivent un traumatisme si violent qu’il peut provoquer un état de stress post-traumatique chez certains membres. Après le premier moment de stupéfaction, les parents sont souvent désemparés face aux rouages de la justice, se sentent coupables, tristes et souvent de la colère.

Le plus compliqué à gérer pour les familles, est le regard des autres. Quand je parle des « autres », je parle de la famille élargie, des amis, et parfois des collègues de travail. Si l’acte commis devient un fait divers divulgué en place public, alors la famille va devoir faire face aux jugements de tous.

Ce qui est terrible, c’est que la plupart du temps, les parents voient leurs compétences éducatives remises en question, tant par leur entourage que par le système judiciaire, car ce dernier estime qu’il est de la responsabilité des parents de faire en sorte que leur enfant ne transgresse pas les limites.

Du coup les parents doivent non seulement gérer leur propre choc émotionnel, mais en plus se justifier sur un « échec » d’éducation qui n’en est pas un et sur leurs compétences à remettre leur enfant dans le droit chemin, alors que celui-ci n’a jusque-là jamais dérapé !

Les conséquences psychiques peuvent disloquer la famille car elles remettent en question la fiabilité des liens d’attachement tissés entre tous.

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Solidarités familiales

Les familles soumises à ces dérapages de leur enfant, ont la plupart du temps tendance à être solidaire. Cependant il existe 2 possibilités : le rejet du jeune en infraction par la fratrie ou, au contraire, le resserrement des liens familiaux. La famille élargie joue également un rôle primordial dans le soutien ou non de l’enfant délinquant. Autre point important, si l’évènement est unique, les mécanismes familiaux d’entraides seront différents que si c’est la énième fois que l’ado se retrouve face à la justice. Dans le 2ème cas de figure, certains parents expriment même leur soulagement que leur enfant soit enfin cadré par la justice.

Jusqu’à quel point les parents ont-ils du pouvoir pour faire cesser ces comportements ?

Tant que les liens d’attachement et le dialogue existe dans les familles, la possibilité de sortir un enfant de son problème est fort. Les familles peuvent également avoir des aides auprès de personnes tierces comme des amis proches, le système scolaire, une association, les pairs de l’enfant, les grands-parents, etc. …

Il va falloir remettre en place des règles très claires et précises et surtout s’y tenir. Punir un jeune à la maison qui est déjà passé dans les mains de la police et éventuellement d’un juge n’est absolument pas efficace. Lui dire que vous n’avez plus du tout confiance en lui, n’aide pas beaucoup non plus. Il vaut mieux lui demander comment il veut s’y prendre pour regagner votre confiance et du coup, comment l’aider pour cela.

Il faut comprendre qu’un comportement délinquant chez un jeune, lui permet d’accéder rapidement à une certaine notoriété auprès de ses pairs, avoir un statut et surtout de la reconnaissance. Ces actes répondent à un besoin d’exister, chose qui peut expérimenter autrement. Les parents, avec de l’aide, doivent sonder les motifs qui se cachent derrière ces comportements et proposer au jeune d’autres façons de satisfaire ces besoins.

Prendre en compte les besoins des parents

La judiciarisation d’un enfant a un lourd impact sur la vie de ses parents. Leur santé, leurs relations familiales et professionnelles, ainsi que leur organisation quotidienne, sont profondément affectées.

Ils vont avoir un besoin fondamental de soutien émotionnel, psychologique et pratique. Les parents peuvent se sentir isolés et jugés par leur famille ou leurs collègues. Ils peuvent rencontrer d’autres parents par le biais d’associations, pour se sentir mieux entourés et s’échanger des conseils. Il faut aussi que l’information sur les procédures judiciaires leur soit plus accessibles et compréhensibles.

Finalement, les parents demandent à être compris sans être jugés, tant par les instances judiciaires, que par tout leur entourage.

Il n’y a que dans le dialogue à tous les niveaux, que la situation sera surmontée.