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COVID-19 et cohabitation lors de la rupture du couple

Quand la cohabitation devient obligatoire

Si le COVID-19 a révélé que le télétravail et la vie en famille sont parfois compliqués, il a mis aussi le doigt sur la difficulté à se séparer.

Un grand nombre d’études ont été menées et sont encore menées sur les raisons et les conséquences de la rupture d’un couple, avec ou sans enfants. A contrario, peu de choses sont expliquées sur le processus de la rupture en elle-même. Des psychologues / psychiatres systémiciens comme Mony Elkaïm ou Robert Neuberger ont proposé leurs recherches sur la fabrication du couple, leurs difficultés à tenir dans le temps et sur les raisons de la séparation.

Les ruptures sont des processus et non des évènements ponctuels dans la vie d’un couple. Même quand la séparation est brutale et soudaine pour l’un des deux, cette rupture fait partie d’une décision maturée parfois inconsciente.

Au bout du compte, toute fin à un processus. Que ce soit le deuil, la rencontre amoureuse, le changement de vie, ou la séparation, des mécanismes conscients comme inconscients se développent sur une certaine durée. Lorsque qu’un couple décide d’emménager ensemble, cette décision fait également partie d’un processus.

La question fondamentale que vous pouvez vous poser quand c’est la fin de quelque chose pour vous (quelle que soit la chose en question), c’est quelle partie de vous disparait avec cette chose ?

Il faut savoir qu’à Genève, 1 couple sur 3 divorce. Celui-ci se banalise et la crise conjugale dans le couple devient soudainement normale. Aujourd’hui on regarde les couples qui tiennent dans le temps comme une rareté, à l’inverse d’il y a 30 ans en arrière.

Pour comprendre le processus de séparation, il faut comprendre de quoi sont fait les liens d’attachements. La recherche scientifique a énormément exploré ce sujet, tant au niveau physiologique que psychique.

Un des tout premier symptôme du processus de séparation est la désillusion. C’est quand le désir « phantasmé » de ce qu’est « le couple » d’un des conjoints ne colle plus à la réalité et qu’il en prend conscience. S’ensuit le doute, la déstabilisation des croyances profondes, l’insécurité, la frustration, la colère ou l’éloignement. Pour peu qu’un des 2 ai des comportements donnant raison à celui ou celle qui doute, et c’est la fin précipitée.

On peut donc dire qu’on ne se sépare que rarement du jour au lendemain, ce qui conduit à des périodes plus ou moins longues durant lesquelles les ex-conjoints continuent à vivre ensemble, bien que séparés.

Si 1/3 des couples qui se séparent se disent obligé de cohabiter pendant un certain laps de temps sous le même toit, en 2020, 90% des couples à Genève n’ont pas pu se « quitter ». L’impossibilité de bouger à cause du confinement, le nombre de biens immobiliers libres et prêts à la location étant déjà tendu sur le marché genevois, s’est vu réduis à peau de chagrin en 2020. Les exigences sanitaires ont encore amplifié le phénomène. Si l’un des ex-conjoints a la chance d’être hébergé par sa famille ou des amis, il peut partir rapidement du foyer initial. Genève étant une ville internationale, une grande majorité des couples installés n’ont pas de famille proche près d’eux. Ils ne peuvent compter que sur eux-mêmes.

Bien souvent, la période de séparation où la cohabitation est obligatoire est très brève. Cependant, au fil des années, la conjoncture économique a obligé de plus en plus es couples à rester sous le même toit pendant quelques semaines, voire des mois.

Avant que la décision de la séparation ne soit verbalisée clairement par l’un des ex-conjoints, le couple cohabite dans le non-dit. Cette situation est variable. Elle peut exister depuis 2 mois comme depuis quelques années. Lors des séances de thérapie de couple, se sont les femmes qui évoquent le plus souvent ce moment.

Lorsqu’il y a des enfants de moins de 15 ans, plus de couples ont tendance à cohabiter plus longtemps après la rupture annoncée

La probabilité d’avoir continué à vivre ensemble pendant au moins deux mois est plus fréquente lorsque les ex-conjoints ont des enfants dont le plus jeune a moins de quinze ans. Pour maintenir le couple parental et préparer les enfants à la séparation conjugale, un certain nombre de couples décide de continuer à vivre ensemble. Cela leur permet aussi de redéfinir l’organisation quotidienne de la famille (résidences, changement d’école, etc.).

Le fait de posséder des biens mobiliers ou immobiliers communs, qui concerne les trois quarts des couples séparés, exerce un effet important. Lorsque des biens sont partagés, la probabilité d’avoir continué à vivre ensemble sous le même toit est plus de deux fois supérieure. La décision de la vente éventuelle du logement ou le partage des biens mobiliers sont autant d’éléments qui contribuent à allonger le processus de séparation et favorisent la poursuite de la cohabitation.

…et lorsque cela fait longtemps qu’on est ensemble

En écho aux facteurs familiaux et matériels, la vie commune post-séparation est plus fréquente lorsque la relation a duré longtemps. Au-delà de 10 ans de vie commune, les couples arrivent parfois à continuer à vivre dans le même logement bien qu’ils soient séparés.

L’âge auquel survient la séparation joue aussi positivement sur le fait de continuer à vivre ensemble. À caractéristiques comparables, plus la personne est âgée (après 45 ans) lorsqu’elle se sépare, plus la probabilité d’avoir poursuivi la vie commune augmente. La proportion est encore plus grande chez les personnes à la retraite. Cette dernière es par ailleurs, un moment propice à la rupture. Une longue vie commune s’accompagne d’habitudes quotidiennes dont il peut être difficile de se détacher. L’emprise de ces routines est susceptible d’être plus importante avec l’âge et la crainte de l’isolement.

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Alors, quoi faire ?

La situation actuelle ne laissant pas beaucoup de marge de manœuvre et les politiciens n’étant pas vraiment impliqués dans cette problématique spécifique, un des outils possibles est de vous faire accompagner.

Pour pouvoir organiser une cohabitation sans trop de heurts et violences, il faut impérativement qu’il y ai une médiation par le biais d’un-e professionnel-le. Que ce soit une assistance sociale, un-e médiateur-trice, un-e psychologue…peut importe, l’objectif est de pouvoir continuer à vivre seul ensemble et surtout, à gérer les enfants quand il y en a. C’est un suivi qui doit être d’au moins 1 fois par semaine, avec la possibilité de contacter la personne tierce si jamais les tensions deviennent ingérables entre 2 rendez-vous.

Cet exercice fait partie des outils que je propose à mes patients. On travaille alors en réseau, incluant les avocats, pédiatres, enseignants et autres intervenants si besoin, jusqu’à ce que la séparation physique et le chacun chez soi puisse exister.