Le sujet est délicat, mais plus forcément tabou
La fidélité reste la valeur principale pour 85 % des personnes qui sont en couple, alors pourquoi certains sont prêts à pardonner à un partenaire adultère ?
Au plus loin que remonte le couple, les différentes époques et sociétés ont admis le désir masculin comme étant « avoué et visible ». Il se définit comme une donnée physiologique et la puissance du désir « est souvent présentée comme irrépressible ». La femme, quant à elle, avoue rarement son besoin de sexualité.
Les relations homme / femme ont très longtemps reposés sur l’idée que la femme, jusqu’à sa majorité, dépend de son père, puis de son mari, donnant à l’homme « le pouvoir absolu ». Quels que soient les pays et les coutumes, l’institution du mariage est à la source de ce pouvoir, en assurant aux hommes la répartition des femmes entre eux. Les femmes deviennent alors des « objets ». Elles sont en même temps un instrument de promotion sociale avec les mariages arrangés, et un outil permettant la survie de la lignée paternelle. Grâce à ce mode de fonctionnement, les hommes peuvent alors vivre des aventures féminines quand leurs besoins s’en fait sentir.
La femme ne peut se permettre la même chose car elle a hantise de prendre le risque de mettre au monde des d’enfants illégitimes, alors que leur devoir est de protéger l’héritage de l’homme.
A l’époque, un honnête homme ne traitait pas son épouse comme sa maîtresse. Avec l’épouse, il est prisonnier d’un carcan qui l’oblige à considérer ses relations sexuelles comme celles d’accomplir son « devoir » conjugal ». Il ne doit aucunement mêler cet acte avec une quelconque recherche érotique. L’époux est responsable de la moralité de sa femme légitime : « Une femme mariée a droit au respect et aux convenances. ». Il lui faudra alors chercher du plaisir ailleurs, dans le lit d’une femme avec laquelle il n’engage rien.
Malgré tout, l’adultère existe chez l’un comme chez l’autre, la différence essentielle étant qu’il est socialement admis, voire encouragé chez l’homme mais condamné chez la femme.
Cet héritage social est très tenace
Aujourd’hui, bien que les sondages fassent part que l’adultère est quasi équivalent chez l’homme et chez la femme, les mécanismes de l’infidélité reprennent souvent ceux qui perdurent dans l’inconscient collectif. Encore beaucoup de femmes, les « maîtresses », vivent dans l’ombre du mari incapable de décider s’il se sépare ou pas de son épouse. Les hommes ne sont pas en reste, ils sont eux aussi, l’amoureux d’une femme mariée qui ne voudra pas les choisir.
A partir des années 1970, la société ancre des valeurs de liberté personnelle et de réalisation de soi, tout autant que d’égalisation des places et des rôles à l’intérieur de la famille et dans les interactions entre hommes et femmes. Il s’agit désormais de plus en plus d’être « libres ensemble ». On assite alors à des injonctions sociales à la réalisation de soi à tout prix. Paradoxalement, la société est maintenant basée sur la surconsommation, avec une accessibilité super facile aux tentations extra conjugales via Internet et les sites de rencontres. Naît alors une sorte de crispation défensive sur la valeur de fidélité conjugale.

Mais alors pourquoi l’infidélité ?
Il y a plusieurs façons d’aimer. Nous sommes tous des miroirs les uns pour les autres. On tombe donc amoureux de l’autre, mais également de ce qu’il nous renvoie de nous-même. Dans le lien qu’on tricote avec l’autre, la dépendance affective risque de créer des fonctionnements d’exclusivité qui viendront entraver les libertés individuelles de chacun. Ce sont, en partie, ces mêmes risques lorsqu’on parle d’amour passionnel et/ou fusionnel.
L’amour passionnel et fusionnel suggère une fidélité absolue. C’est faire le don de soi à l’autre pour toute sa vie. C’est interdire à son entourage, l’accès affectif à son amoureux -se. Faire cette promesse revient à dire qu’au moment où on la fait, on estime que rien ne change. Or la vie est faite de multitudes d’évènements qui vont venir contrarier cette promesse. Il va falloir s’adapter à tous les changements. Il faudra pouvoir avancer à la même vitesse, comprendre les choses au même moment, les analyser de la même façon, et c’est tout simplement impossible.
Pour que deux personnes libres puissent s’aimer sans que cet amour prenne la forme d’une somme de compromis qui viendrait contredire leurs libertés individuelles, il est nécessaire qu’ils partagent d’emblée des intérêts et des valeurs.
Il faudra que le sens qu’ils donnent à leur relation la même direction. La liberté individuelle dans cet amour vécu à deux sera ainsi fait d’un partage d’intérêts et de valeurs communes, qui permettront à chacun, sans renoncer à soi, de réaliser aux côtés de l’autre un projet existentiel redéfini.