Aller au contenu

Le syndrome du nid vide

Interview Radio RTS1_émission "on en parle" du 24 septembre 2019

Le syndrome du nid vide

Au fond, qu’est-ce que je perds de moi en tant que parent quand mon enfant s’en va de la maison pour vivre sa vie de jeune adulte ? Quelle partie de moi disparait avec son départ ?

Tout va dépendre du lien que vous avez tricoté avec vos enfants. Au plus il sera fusionnel et au plus la séparation sera difficile. Il faut tenir compte également des liens qui unissent l’ensemble des membres de la famille. Comment cela se passe dans la fratrie et entre les parents et les enfants.

Suivant les conflits familiaux, le départ d’un enfant peut être vécu comme un soulagement pour tous. Mais quand un enfant a monopolisé toute l’énergie familiale pour gérer ses « crises » et que la dynamique familiale s’est construite autour de ça, son départ va laisser un grand vide en renvoyant chacun à lui-même et au rôle qu’il a en dehors de l’enfant à « problèmes ».

Et ce vide est source d’angoisse.

Tous les parents vivent le moment où les enfants quittent la maison.

De ce départ peut naître une énorme sensation de vide. Tout ce qui rythmait le quotidien s’en va en même temps. C’est un peu comme faire le deuil d’un rôle dans lequel le parent s’est investi à 100%.

La maison parait bien vide quand les enfants ne sont plus là. Ce qui est le plus compliqué est en fait le quotidien. Ces moments de vie étaient rythmés par leurs allées et venues, l’organisation de leurs activités scolaires et extra scolaire, la visite de leurs amis, les repas en famille, toute cette effervescence qui remplis et parfois débordent les journées des parents.

Retour à la vie à deux. Un moment difficile et brutal qui peut déboucher sur un vague à l’âme bien connu d’un grand nombre de parents.

Les pères sont plus discrets dans leur peine

Le syndrome du nid vide touche en grande majorité les mères. On lie cela au fait que jusqu’au année 2000, c’était elles qui s’investissaient le plus auprès des enfants. Mais les pères ne sont pas en reste.

De nos jours, la nouvelle génération des pères, sont confrontés à la même sensation de vide, mais la plupart du temps ils le gèrent émotionnellement différemment.

Ils évoquent plutôt une une raison satellite : un petit coup de déprime, un manque d’énergie, le sentiment de n’avoir plus goût à rien… En creusant, on se rend compte que cela tire souvent son origine du départ des enfants du foyer ». La majorité des hommes qui viennent la consulter sont en fait très pudiques sur les sentiments qu’ils éprouvent à ce moment-là de leur vie, ou ne font tout simplement pas le rapprochement.

les pères ont tendance à minimiser l’impact émotionnel que cela peut avoir pour eux. Ils préfèrent se persuader (à raison d’ailleurs!) qu’il est dans la logique des choses que les enfants partent faire leur vie. Ils rationalisent et tentent de mettre une distance entre leur tête et leur coeur.

Ces papas se prennent en plein coeur ce bouleversement de leur vie avec violence, faute de s’y être préparés ou d’en avoir parlé plus tôt.

Peut alors survenir un sentiment de solitude, de tristesse et d’inutilité, susceptible d’évoluer vers une vraie dépression. Pour certains, cela peut aussi renforcer des addictions qui existaient déjà auparavant.

Les mères les plus touchées par le syndrome du nid vide

Certaines mères surinvestissent leur rôle de maman et ont du mal à se dire qu’être parent est avant tout autonomiser ses enfants pour qu’ils puissent vivre pleinement leur vie d’adultes. Qu’ils ne sont pas là pour combler un vide dans leur vie. Elles peuvent alors se sentir inutiles ou abandonnées.

Mais il y a aussi beaucoup de mères qui ont bien intégré l’idée que les enfants vont partir et les ont aidés pour cela. Malgré tout, au départ de ces derniers, elles ressentent ce vide qui fait place à toute l’énergie déployée pendant des années à leur donner des outils pour qu’ils puissent se lancer dans la vie avec le plus d’atouts possibles.

Et le couple dans tout ça ?

Quand les enfants partent, les parents se retrouvent en tête à tête avec leur conjoint. Si les enfants étaient le ciment du couple, alors il y a de fort risque de séparation.

Il va falloir « ré » investir son couple bien avant que les enfants partent. Vous aurez beau être de supers parents, vous n’en restez pas moins un couple qui s’est rencontré à un moment donné et a eu envie de fonder une famille. Il faudrait essayer, à défaut de le retrouver, au moins se rapprocher le plus de ce sentiment originel qui a permis au couple d’en devenir un.

Si vous avez perdu de vu ce fameux couple du départ, il faut se faire aider. Par des amis, des proches, des activités rien que pour vous 2, et le cas échéant, quelques séances de thérapie histoire de remettre les choses à plat.

Si je ne suis plus une « super maman », qui suis-je ?

Quand on devient parent, il faut s’aménager des moments rien que pour soit. Avoir une vie sociale et des activités sans enfants. Même si le quotidien est chronophage.

En bref, il faut devenir égoïste. On ne peut pas aider qui que ce soit si on ne s’aide pas soi-même. Au même titre qu’on ne peut pas aimer si on ne s’aime pas un minimum.

Le mot d’ordre : « Ne pas s’oublier ! »

En réaction, un jeune adulte peut saboter inconsciemment son départ du nid pour « protéger » sa mère. Si les angoisses de cette dernière sont trop importantes, toute la préparation du départ de l’enfant devient compliquée, source de conflits, difficile à mettre en œuvre. Le jeune adulte peut même en arriver à rater la fin de sa scolarité pour ne pas avoir à quitter trop vite la famille et « abandonner » sa mère.

Quelles solutions possibles ?

Pour aider ces parents victimes de ce syndrome, l’idéal serait de s’y prendre dès les premières séparations. Quand la mère éprouve une trop grande douleur à laisser son enfant à la crèche, quand il part pour la 1ère fois loin d’elle pendant un certain temps. Si tous ces moments qui égrainent la vie de leur enfant sont chaque fois douloureux et compliqués, le jour où il part pour de bon, ça sera insupportable pour la mère.

Tout un réapprentissage.

Il faut alors réapprendre à se centrer sur soi. Un des outils qui permet cela, c’est remettre en route le moteur du plaisir. S’accorder plein de petites choses, de petits moments qui font plaisir. Si je dis « petits » c’est parce qu’au début, la mère les vit avec de la culpabilité. Il faut donc y aller doucement, progressivement, jusqu’à que ça devienne une normalité.

Ces mamans qui ont bien fait leur « job ».

Faire également comprendre à cette maman que s’occuper d’elle ne signifie pas qu’elle se désintéresse ou « n’aime » plus ses enfants. C’est lui rappeler qu’elle doit faire confiance en ce qu’elle leur a transmis comme capacités à pouvoir se débrouiller seul. Qu’elle a bien fait son « job » de maman. Qu’elle peut leur faire confiance. Ce chemin est plus ou moins long en fonction de ce que le parent est prêt à lâcher.

Quoi qu’il en soit, il faut en parler et surtout, ne pas rester seule face à ses angoisses.