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Les dysfonctionnements émotionnels comme reflets du traumatisme complexe

Lors de mes thérapies, je suis souvent sollicitée pour travailler avec un enfant ou un adulte ayant, ou pas, été diagnostiqué TDHA, TSA, HPI, HPE. Nous sommes dans un moment de la psychiatrie qui a besoin de poser des diagnostics. Cela a un double effet. Le premier est de permettre à la personne de bénéficier d’aides adaptées à sa problématique, et être médicamentée si besoin, de manière ciblée.

Le deuxième effet est que cela rassure le patient et surtout son entourage. Il peut ainsi justifier ses comportements inadéquats et autorise alors la société en général à ne pas le juger trop sévèrement. Quand le diagnostic est posé par des médecins qui ont fait faire tous les tests en lien avec ces pathologies, la société prend en charge via des mesures d’aides, tout ou partie du financement de ces maladies.

Le problème réside dans le fait qu’aujourd’hui, il y a une sorte d’effet de mode sur le besoin « d’être » TDHA, TSA, HPI, HPE, pour expliquer son mal-être, ses dysfonctionnements, ses angoisses, ses impossibilités à gérer l’affectif et l’émotionnel, à comprendre ses incapacités à se connecter aux autres, à établir des liens « sécure » …La plupart du temps, très peu de personnes ont fait les tests auprès de spécialistes. On entend plutôt dire : « on m’a dit que j’étais sûrement… », « j’ai lu que…Et je me suis complètement reconnue dans… ». Bref, on suppute, on pense que, on est convaincu de…

Quand je me retrouve en séance face à une personne qui m’explique tout ça d’elle et/ou de ses enfants, mon reflex est de penser au trauma complexe ou à un état de stress post-traumatique.

Alors je pose les questions suivantes :

« Est-ce que dans votre vie jusqu’à aujourd’hui, vous avez été témoin ou vous avez vous-même subi des violences physiques, psychiques ou sexuelles ? »

7 fois sur 10, on me répond « OUI ».

La 2ème question est :

« Est-ce que ces violences vous ont été faites de manières répétées ? Et si oui, selon vous, combien de fois sur combien de temps ? »

Et la 3ème question est :

« Est-ce que ces violences ont été faites par quelqu’un de proche ? Est-ce qu’elles existent encore ? »

Les réponses varient, mais je suis toujours surprise que les gens répondent très sincèrement et directement à la 1ère question. Souvent, ils me disent qu’on ne leur a jamais demandé. On retrouve le même mécanisme chez beaucoup de professionnels de l’obstétrique, qui demandent toujours à leurs patientes si elles fument, mais jamais si elles boivent.

Il faut être conscient qu’aujourd’hui des enquêtes diligentées par les pouvoirs publics (IVSEA et GENESE 2021), révèlent par exemple, qu’en 2022, 1 enfant sur 5 subit ou a subi des abus sexuels. Que dans 1 famille sur 10 il y a de la violence intrafamiliale. Que le numéro d’urgence « 143- La main tendue » en Suisse, a reçu en 2022, 199’089 appels dont plus de 25% sont en lien avec de la souffrance psychique.

Donc clairement, nous vivons dans une société faites de violences intrafamiliales, qui sont encore bien trop invisibles car taboues et surtout tues en dehors du cercle familial.

Une très grande proportion des états de dysfonctionnements émotionnels, affectifs, relationnels, est le résultat d’un stress traumatique complexe, avec comorbidités et mise en place de manière inconsciente de mécanismes automatiques de survie.

Il faudrait alors que les spécialistes de la santé chaussent leur lunette sur le TRAUMA et fassent faire des tests en lien avec ce dernier. Qu’ils posent systématiquement les 3 questions essentielles à leurs patients et soient formés à la détection des traumas complexes et à leurs traitements thérapeutiques.

Cela permettrait de gagner beaucoup de temps dans l’aide à apporter à ces personnes en souffrance.

Je vous explique, dans mon prochain post, les mécanismes du trauma complexe et les systèmes inconscients de défenses que le cerveau met en place quand il est confronté à des violences répétées.

À lire:

Ciivise – Commission Indépendante sur l’Inceste et les Violences Sexuelles faites aux Enfants

 À voir :

RTS – Stress post-traumatiques, un trouble reconnu sous sa forme complexe