Que signifie le besoin d'acheter ?
Les soldes d’hiver ont démarré et voilà que votre carte bleue vous démange. Tous les commerces vont vous tenter à grands coups de supers remises, de prix imbattables, de coups de cœur, et vous allez céder immanquablement.
Faire les soldes c’est être malin
L’achat rapide d’un article en solde a fait l’objet de plusieurs études qui tendent à dire qu’il donne à l’acheteur une impression de contrôle et de déculpabilisation. Cette impression naît du sentiment d’avoir fait « une bonne affaire » et donc d’être « malin ». Vous avez su dénicher le bon plan, même si ce dernier ne vous sert à rien.
Se sentir malin nous permet de valoriser notre estime de nous. Cela augmente l’idée qu’on a de pouvoir naviguer aisément dans la vie malgré les embuches et trouver des solutions alors que d’autres n’y arrivent pas. On parlera d’ailleurs toujours de sa dernière trouvaille qui nous a coûté la moitié de son prix, avec fierté. Car oui, faire une bonne « affaire » est vu par beaucoup comme une preuve d’intelligence et de débrouillardise. Jamais la personne à qui vous racontez votre exploit financier ne vous demandera si, au final, vous aviez vraiment besoin d’une 30ème paire de chaussures.
Certaines personnes passent un temps fou à dénicher les « bonnes affaires ». Elles font du repérage pré-soldes, comparent les prix sur Internet, amassent les coupons de réduction et on est bien obligé d’admettre : elles font vraiment de « bonnes affaires ».
Mais uniquement sur les produits que les commerçants auront mis en promotion. Eh oui ! l’industrie du commerce ne promeut que ce qu’elle veut et surtout les biens sur lesquels elle pourra faire des belles marges, même si le produit est soldé. Pas folle la guêpe !
Aimer posséder
C’est le fait d’acheter qui provoque la jouissance, comme si, lors de ce moment précis que sont les soldes, vous pouviez enfin vous mettre dans la peau de quelqu’un de « riche » et dépenser sans compter. A chaque achat vous jouissez de posséder l’objet qui vous possède en retour.
Les soldes suppriment la culpabilité car elles sont encensées par les médias, par les gouvernements qui les organisent en les valorisant comme booster de l’économie, par vos ami-e-s qui feront une espèce de compétition à celui qui aura trouvé LE truc le moins cher. Il vous sera alors extrêmement difficile de résister.
En effet, si vous supprimez la partie émotionnelle de l’achat et que vous raisonnez, il y a de fortes chances que vous n’achetiez rien. Rien qu’en vous disant : « et si je portais déjà tous les vêtements que j’ai dans mon armoire…aurais-je encore besoin d’en acheter ? ».
J’ai une patiente qui m’a expliqué son mécanisme de déculpabilisation face aux soldes. Pour un article acheté, elle donne à un organisme un habit ou objet qu’elle n’utilise plus depuis en tout cas 2 ans. Elle s’est ainsi rendu compte du nombre de « choses » qui dormaient dans ses placards.
La pathologie de l’achat compulsif
Le besoin irrépressible d’acheté est souvent le fait d’une blessure narcissique durant l’enfance. Le lien affectif a été absent, rompu ou maltraitant. L’enfant se retourne alors vers l’objet, comme un « doudou » pour palier à sa détresse d’un manque affectif.
De nombreuses études révèlent que nos objets répondent à différents besoins émotionnels. Chaque objet acheté est imprégné de l’émotion qu’il a créé et devient un fil du lien affectif qu’on tricote entre soi et « l’autre », ou plutôt, dans ce cas de figure, du manque de « l’autre ». De sorte que lorsque les objets sont abîmés ou perdus, vous vous sentez personnellement abîmé ou perdu.
Votre vie s’encombre ainsi de plein d’objets, de plein de fils qui forment un tricot inachevé que vous vous acharnez à vouloir terminer, pour lui donner une forme sans savoir vraiment laquelle.
Les achats compulsifs relèvent la plupart du temps des mécanismes addictifs. Ce sont les circuits neuronaux de l’addiction qui entrent en jeu. Les soldes ne sont qu’un prétexte pour justifier cette boulimie d’achats. Il s’agit d’un acte répété qui dépasse le simple cadre de l’achat lors des soldes, et crée de graves soucis pour une personne, un couple ou une famille. Il faut alors consulter des médecins psychiatres formés aux mécanismes de l’addiction avec ou sans substances.