Au-delà du cadre légal, elles touchent à la relation humaine, à la mémoire traumatique, à la parole souvent brisée des victimes et à la responsabilisation des auteurs.
Dans ce contexte, les avocats jouent un rôle déterminant, que ce soit dans la défense des victimes ou celle des auteurs présumés.
Mais comprendre la réalité psychologique et systémique de ces violences est essentiel pour exercer ce rôle avec justesse.
À Genève, comme ailleurs en Suisse, les avocats spécialisés en droit de la famille ou en droit pénal sont souvent confrontés à des situations de violence conjugale ou intrafamiliale.
Pourtant, la formation juridique classique n’aborde que rarement la dimension psychotraumatique de ces dossiers.
Comprendre le traumatisme et ses conséquences permet pourtant de :
mieux interpréter le discours d’une victime (même lorsqu’il est confus ou contradictoire) ;
accompagner un auteur dans le déni sans banaliser la violence ;
adapter la stratégie juridique à la temporalité émotionnelle du client ;
prévenir la retraumatisation judiciaire, bien documentée par des auteurs comme Hélène Romano ou Muriel Salmona.
Les violences conjugales ne se limitent pas à des coups ou à des menaces. Elles s’enracinent dans un système relationnel fait de contrôle, de peur, de silence et d’emprise.
Les travaux de Gregory Bateson, Paul Watzlawick et Mony Elkaïm ont montré que toute relation violente tend à se réguler selon une logique d’homéostasie, où chaque tentative de changement réactive la peur ou la domination.
Sur le plan neuropsychologique, la mémoire traumatique explique pourquoi les récits des victimes semblent parfois incohérents : la peur bloque les circuits de la parole et de la mémoire narrative.
Un avocat formé à ces réalités sait qu’un témoignage hésitant n’est pas nécessairement mensonger, mais souvent le signe d’une dissociation traumatique. Cette compréhension fine du trauma transforme la manière de préparer un dossier, d’interroger un client et de plaider devant un juge.
Dans ma pratique de thérapeute systémique spécialisée en violences intrafamiliales, j’observe combien le travail des avocats influence le processus de reconstruction psychique des victimes et la responsabilisation des auteurs.
L’avocat est souvent le premier interlocuteur de confiance : il doit savoir écouter sans blesser, orienter sans juger, défendre sans nier la réalité de la souffrance.
C’est pourquoi j’organise régulièrement des sessions de sensibilisation pour les avocats à Genève, afin de partager des outils simples :
repérage des signes de trauma,
communication non retraumatisante,
travail interdisciplinaire avec les psychologues,
postures adaptées selon le rôle de défense.
Ces rencontres nourrissent une justice plus humaine, où le droit et la clinique se répondent.
De cette volonté de rapprocher le monde juridique et le monde psychologique est née une collaboration unique à Genève avec Maître Andrés Martinez,
avocat en droit de la famille au sein de l’AFM Genève, association reconnue d’utilité publique soutenant les familles monoparentales.
Ensemble, nous proposons des séances juridico-psychologiques : des rencontres à deux voix (avocat + thérapeute) permettant d’accompagner les personnes dans leur processus de séparation, parfois marqué par la violence.
Ces séances permettent de :
clarifier les enjeux juridiques (mesures protectrices, autorité parentale, garde, finances),
comprendre les dynamiques émotionnelles et les mécanismes coercitifs,
préserver la communication entre parents pour protéger les enfants,
construire un plan de séparation intelligent et respectueux.
Sensibiliser les avocats aux violences intrafamiliales, conjugales et sexuelles n’est pas un simple module de formation : c’est un changement de culture professionnelle. C’est reconnaître que la justice ne peut se contenter d’appliquer la loi sans comprendre la douleur, la peur ou le trauma qu’elle rencontre.
Nous utilisons des cookies pour vous garantir la meilleure expérience sur notre site. Si vous continuez à utiliser ce dernier, nous considérerons que vous acceptez l'utilisation des cookies.